
Une femme de 93 ans a été expulsée de son logement social, tôt jeudi matin, à Montpellier, dans le quartier Croix d'Argent. Selon le bailleur, ACM Habitat, son appartement servait à un trafic de drogue qu'elle ne pouvait ignorer. Plusieurs voisins ont témoigné contre elle.
Le bailleur ACM Habitat l'accuse d'avoir participé à un trafic de drogue, notamment en stockant les stupéfiants et en accueillant les dealers, des membres de sa famille. Le 23 mai 2024, le tribunal judiciaire de Montpellier avait ordonné à Mme Aïcha A. de quitter son logement, ce qu'elle avait refusé, d'où l'expulsion de ce jeudi 24 octobre. L’opération d’expulsion, encadrée par des policiers et des pompiers, s’inscrivait dans le cadre du programme Zéro impunité. Il est à noter que l’entrée de l’immeuble avait été aspergée d’essence. Aïcha A. et ses enfants contestent vigoureusement cette expulsion.
Hafida, sa fille : « Ils étaient au moins 40 pour faire cela, on dirait qu'on est Pablo Escobar ! … Moi, mes frères et mes sœurs, on n'a jamais trafiqué de drogue, on a été frappés et menacés par d'autres, on a même porté plainte plusieurs fois à la police »
Alain Braun, directeur d'ACM Habitat : « C'est une affaire sensible avec un risque avéré lors de l’expulsion pour les résidents comme pour la famille, car le hall de l'immeuble avait été imbibé en partie d’essence, ce matin … Nous n’avons pas pris cette décision à la légère compte tenu de l’âge de la locataire. Nous n’avions jamais rencontré un cas similaire par le passé. Mais ce n’est pas le bailleur qui décide seul de l’expulsion. C’est l’application d’une décision de justice en date du 23 mai 2024. Après l’examen des pièces du dossier, le juge a retenu l’existence d’un trafic de stupéfiants qui se déroule dans l’appartement de la locataire, mais aussi dans les garages et également dans le hall de l’immeuble. Le juge affirme l’existence d’une infraction commise par des membres de la famille hébergés par la locataire. … Le juge a décidé d’expulser la locataire parce qu’elle ne pouvait pas ignorer le trafic qui est commis par les personnes qu’elle accueille chez elle dans la résidence. Il a décidé qu’il n’y avait pas de délai à lui accorder parce qu’elle n’a pas démontré sa bonne foi et elle ne s’est pas présentée aux convocations »
François-Xavier Lauch, le préfet de l’Hérault : « L’expulsion ce jour de [Aïcha A.], 92 ans, du logement social qu’elle occupait depuis 23 ans envoie un message clair et sans ambiguïté. Faire de son appartement un lieu de stockage de la drogue, un point d’accueil des dealers et guetteurs, revient à participer et concourir à la pérennisation du trafic de stupéfiants. Les trafics gangrènent nos quartiers, génèrent des guerres de territoires et terrorisent les habitants. Tolérance zéro sur les personnes qui jouissent de ces trafics et favorisent leur expansion. Cette situation intolérable a pris fin. »
Dans sa décision, Le juge s'appuie sur sept témoignages de voisins de la nonagénaire. Pour eux, l'appartement de "la mamie est un véritable quartier général du trafic de drogue". Ils décrivent "des dealers présents dans l'appartement" de madame et de sa fille, "des guetteurs vêtus de noirs devant la résidence dès le matin". Le juge estime que ce trafic "génère une insécurité et des nuisances intolérables pour les habitants" et il ajoute que "la locataire ne pouvait pas ignorer les transactions qui s'effectuaient chez elle par son fils". Selon la préfecture de l'Hérault, "l’intéressée, qui a refusé une place en maison de retraite, sera prise en charge par sa famille". Elle est aujourd'hui logée dans un hôtel à Montpellier.
Depuis la fin d'année 2022, une dizaine de locataires d'ACM Habitat ont été expulsés dans le cadre du programme zéro Impunité mais c'est la première qu'un locataire de cet âge est concerné.
PHOTO : MIDI LIBRE - Jean Michel MART
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